samedi 16 août 2014

"TU FAIS PARTIE DE CES RARES HOMMES QUI, POUR LE MEILLEUR ET POUR LE PIRE, SAVENT TRES EXACTEMENT QUI ILS SONT"

CLAN PÊCHEUR


 Extrait...

Jim pêchait la biche de mer depuis toujours. Il en avait trouvé en Indonésie, en Malaisie où on l'appelle "Trepang", dans les Antilles, en mer de Chine, en Micronésie, en Polynésie, et pour la première fois en Nouvelle-Calédonie où on l'appelle la bêche de mer ou biche de mer. 
C'est en regagnant la plage, ses paniers pleins, qu'un coup sur le crâne l'avait endormi pour quelques heures. Il grelotte maintenant de toute sa peau. Un coup d'oeil rapide vers sa barque lui confirme qu'elle a disparu.

Nu et trempé, il marche en vacillant vers la route de Nouméa, quand une petite et vieille Peugeot 206 s'arrête devant lui. Le kanak qui conduit, Simon, l'embarque et l'abrite pour la nuit. Il lui raconte alors, une étrange et bien belle chose. L'histoire du "Clan Pêcheur" de l'île des pins.

SIMON: Tu serais pas un peu inca, toi?
JIM: Aucune idée. Pourquoi pas? Mais je n'en sais vraiment rien. Ou plutôt je suis bien certain que non.
SIMON: Je t'emmène demain à Kunie. Par le bateau, le "Betico". Tu pourras pêcher la biche de mer, et je continuerai l'histoire.
JIM:  Je rêve d'un trésor, et tu m'offres une île entière? Pourquoi?
SIMON: Ce n'est pas un cadeau, c'est une charge, un devoir que tu peux refuser. Mais tu es blanc et tu me dois quelque chose.
JIM: On ne se connait pas! Parce que tu es noir, tu veux me faire cracher tout ce que j'ai?
SIMON: Tu me dois quelque chose depuis toujours. Et tu sembles l'avoir.
JIM: je n'ai rien. Tu l'as bien vu quand tu m'as ramassé sur la route.
SIMON: C'est en toi, malgré toi. Tu n'as dit que trois mots, ou à peu près, mais tu fais partie de ces rares hommes qui, pour le meilleur et pour le pire, savent très exactement qui ils sont. Cette histoire je ne te l'offre pas. Je t'en fais le gardien. Parce que tu es blanc et que tu me dois quelque chose. Et que je t'ai choisi pour ça. A demain.

Jim a dormi sur la natte, écrasé de tout son poids sur le côté droit. Et comme toutes les nuits, et les nuits les plus courtes, il a rêvé d'elle. Sa belle jeune femme, la femme de sa vie, celle qu'il doit rencontrer, celle qu'il attend depuis qu'il pêche, depuis qu'il l'a vue briller dans les yeux des tortues. Il rêve d'elle et la dessine, et la redessine, comme toutes les nuits. Comme toutes les nuits, il lui parle et lui murmure à l'oreille mille phrases, mille mots, mille baisers, et la caresse de mille souffles. Sa propre voix l'éveille, à 4h, comme souvent, et il s'entend dire, dans la mousse des doux cheveux qui bordent l'oreille du beau visage de sa merveilleuse: "Pourquoi la raie de tes fesses captive-t-elle autant mon imagination ? C’est une question déroutante!" 

SIMON: Tu es prêt? Le gardien de l'histoire du Clan?



Belle biche de mer


A demain