jeudi 27 août 2015

L'AUBE FRAÎCHE FRISSONNE DANS LES PALMES DES COCOTIERS

6h.
Aussi rapide que la nuit qui enveloppe la peau de la terre d'ici de son gant, pour la protéger de la lumière, l'aube réveille les oiseaux d'un souffle glacé. La neige de la Nouvelle-Zélande domine les alizés. Quelque part, un lit s'ouvre pour accueillir... Quelque part une nouvelle nuit se veut protectrice, reposante, quelque part... le monde. En Europe de l'est, un homme tape sur le clavier d'un ordinateur. Il se projette un instant dans le mois qui va suivre et ouvre sa messagerie. Dans le sud de l'Espagne, une adolescente prépare son sac de voyage pour partir vers la France. Dans le sud de l'Italie une femme ouvre les contre-vent d'un studio sur la plage aussitôt aveuglée par la luminescence de la lune. A Papette un jeune couple se rendort, deux corps enchevêtrés qui jurent de s'aimer. Un homme respire dans l'haleine douce de la soirée. Un musicien pose sa guitare sur un pied de soutien, et regarde vers le comptoir de l'immense terrasse à Tenerife, allume une cigarette et trempe ses lèvres dans un mojito glacé. Et les esprits s'élèvent et fusionnent et se confondent. Enfin je reconnais le mien, il m'entoure, il me soulève, et quand je lui dis qu'il est beau, qu'il a choisi ses habits avec soin, quand je lui dis que je vois bien pourquoi sa coiffure et son pendentif qu'il me glisse dans la bouche, et je lui raconte l'âme du poisson et le nom de la vague et la petite gueule mousse de ma tortue  sur ma chaussure sur ma guitare et je lui dis que rien ne peut tordre le bras de la vie qu'elle est sur son chemin et je lui montre la direction et je lui dis de regarder la silhouette que notre ombre porte sur le nuage bleu, et qu'il absorbe d'une seule inspiration tous les parfums de la réponse quand il murmure les lettres et les consonnes et qu'il embrasse les voyelles... t... t... jamais comme... qu'il continue de bégayer de répéter de ahaner de s'essouffler de murmurer de reposer de reprendre et de jeter et poser et de reprendre et de jeter et de souffler et de me faire rêver de me faire monter monter jusqu'aux limites de la réalité pour prendre une autre voie... une autre voix... oui je l'entends ta chanson.
6h30
Maintenant le jour est là, alors que la nuit enveloppe là-bas, ailleurs, ailleurs, comme la vie... cette pelote d'épines qui torture la raison et la folie.

Est-ce que les compagnies de théâtre peuvent créer un monde? Est-ce que c'est ce qu'elles tentent toutes dans leur cellule? Microcosme, île petite? Tout Ego seulement? Tout fonctionne donc bien comme une histoire d'atome et d'ion et d'électron et de poussière. Imbibé jusqu'à la fin.

Impossible d'arrêter, de réellement arrêter, de ne plus ouvrir aucun cahier, aucun clavier, aucun projet, impossible, les jours se bousculent au portillon est-ce que la fatigue peut être mortelle comme le disait Vilar?

Je rêve de dormir alors, tomber quand le soleil sera bien haut devant moi. Enfin rêver de moi... de ma vie... ma vraie vie... qui verra le jour un jour...